Hémon | Maria Chapdelaine | E-Book | www.sack.de
E-Book

E-Book, Französisch, 190 Seiten

Hémon Maria Chapdelaine


1. Auflage 2022
ISBN: 978-2-322-45929-2
Verlag: BoD - Books on Demand
Format: EPUB
Kopierschutz: 6 - ePub Watermark

E-Book, Französisch, 190 Seiten

ISBN: 978-2-322-45929-2
Verlag: BoD - Books on Demand
Format: EPUB
Kopierschutz: 6 - ePub Watermark



Cette célèbre évocation du Québec traditionnel au début du 20e siècle compte plus de 150 éditions traduites en 25 langues. Adapté plusieurs fois au cinéma - on se souvient de l'interprétation de Carole Laure dans le rôle de Maria - ce drame mettant en scène la vie pittoresque et courageuse des pionniers canadiens français est publié ici pour la première fois en France dans la version originale de l'auteur. Dans un petit village du Lac Saint-Jean, au nord de la ville de Québec, la jeune Maria doit faire son choix entre trois prétendants : François Paradis, un jeune coureur des bois, Lorenzo Surprenant, un Canadien exilé aux Etats-Unis et Eutrope Gagnon, son voisin, défricheur comme le père de Maria. Mais un événement inattendu bouleversera l'avenir de la jeune fille. Partagée entre son amour pour son pans et la vie facile des villes, Maria devra choisir...

Louis Hémon est un écrivain français, né à Brest, le 12 octobre 1880 et mort dans un accident à Chapleau, le 8 juillet 1913, à l'âge de 32 ans.

Hémon Maria Chapdelaine jetzt bestellen!

Autoren/Hrsg.


Weitere Infos & Material


CHAPITRE II
L’heure du souper était venue que Maria n’avait pas encore fini de répondre aux questions, de raconter, sans en omettre aucun, les incidents de son voyage, de donner les nouvelles de Saint-Prime et de Péribonka, et toutes les autres nouvelles qu’elle avait pu recueillir au cours du chemin. Tit’Bé, assis sur une chaise, en face de sa sœur, fumait pipe sur pipe sans détourner les yeux d’elle une seconde, craignant de laisser échapper quelque révélation importante qu’elle aurait tue jusque-là. La petite Alma-Rose, debout près d’elle, la tenait par le cou ; Télesphore écoutait aussi, tout en réparant avec des ficelles l’attelage de son chien. La mère Chapdelaine attisait le feu dans le grand poêle de fonte, allait, venait, tirait de l’armoire les assiettes et les couverts, le pain, le pichet de lait, penchait au-dessus d’un pot de verre la grande jarre de sirop de sucre. Fréquemment elle s’interrompait pour interroger Maria ou l’écouter et restait songeuse quelques instants, les poings sur les hanches, revoyant par la pensée les villages dont elle entendait parler. — Alors, l’église est finie : une belle église en pierre, avec des peintures en dedans et des châssis de couleur… Que ça doit donc être beau ! Johnny Bouchard a bâti une grange neuve l’été dernier, et c’est une petite Perron, une fille d’Abélard Perron, de Saint-Jérôme, qui fait la classe… Huit ans que je n’ai pas été à Saint-Prime, quand on pense ! C’est une belle paroisse, et qui m’aurait bien « adonné » ; du beau terrain « planche » aussi loin qu’on peut voir, pas de crans ni de bois, rien que des champs carrés avec de bonnes clôtures droites, de la terre forte, et les chars à moins de deux heures de voiture… C’est peut-être péché de le dire ; mais tout mon règne, j’aurai du regret que ton père ait eu le goût de mouver si souvent et de pousser plus loin et toujours plus loin dans le bois, au lieu de prendre une terre dans une des vieilles paroisses. Par la petite fenêtre carrée elle contemplait avec mélancolie les quelques champs nus qui s’étendaient derrière la maison, la grange de bois brut aux planches mal jointes, et plus loin l’étendue de terre encore semée de souches, en lisière de la forêt, qui ne faisait que laisser espérer une récompense de foin ou de grain aux longues patiences. — Tiens, fit Alma-Rose, voilà Chien qui vient se faire flatter aussi. Maria baissa les yeux vers le chien qui venait lui mettre sur les genoux sa tête longue aux yeux tristes, et elle le caressa avec des mots d’amitié. — Il s’est ennuyé de toi tout comme nous, dit encore Alma-Rose. Tous les matins, il allait regarder dans ton lit pour voir si tu n’étais pas revenue. Elle l’appela à son tour. — Viens, Chien ; viens que je te flatte aussi. Chien allait de l’une à l’autre, docile, fermant à moitié les yeux à chaque caresse. Maria regarda autour d’elle, cherchant quelque changement à vrai dire improbable qui se fût fait pendant son absence. Le grand poêle à trois ponts occupait le milieu de la maison ; un tuyau de tôle en sortait, qui après une montée verticale de quelques pieds décrivait un angle droit et se prolongeait horizontalement jusqu’à l’extérieur, afin que rien de la précieuse chaleur ne se perdît. Dans un coin la grande armoire de bois ; tout près, la table, le banc contre le mur, et de l’autre côté de la porte l’évier et la pompe. Une cloison partant du mur opposé semblait vouloir séparer cette partie de la maison en deux pièces ; seulement elle s’arrêtait avant d’arriver au poêle et aucune cloison ne la rejoignait, de sorte que ces deux compartiments de la salle unique chacun enclos de trois côtés ressemblaient à un décor de théâtre, un de ces décors conventionnels dont on veut bien croire qu’ils représentent deux appartements distincts, encore que les regards des spectateurs les pénètrent tous les deux à la fois. Le père et la mère Chapdelaine avaient leur lit dans un de ces compartiments ; Maria et Alma-Rose dans l’autre. Dans un coin, un escalier droit menait par une trappe au grenier, où les garçons couchaient pendant l’été ; l’hiver venu, ils descendaient leur lit en bas et dormaient à la chaleur du poêle avec les autres. Accrochés au mur, des calendriers illustrés des marchands de Roberval ou de Chicoutimi ; une image de Jésus enfant dans les bras de sa mère : un Jésus aux immenses yeux bleus dans une figure rose, étendant des mains potelées ; une autre image représentant quelque sainte femme inconnue regardant le ciel d’un air d’extase ; la première page d’un numéro de Noël d’un journal de Québec, pleine d’étoiles grosses comme des lunes et d’anges qui volaient les ailes repliées. — As-tu été sage pendant que je n’étais pas là, Alma-Rose ? Ce fut la mère Chapdelaine qui répondit : — Alma-Rose n’a pas été trop haïssable ; mais Télesphore m’a donné du tourment. Ce n’est pas qu’il fasse du mal ; mais les choses qu’il dit ! On dirait que cet enfant-là n’a pas tout son génie. Télesphore s’affairait avec l’attelage du chien et prétendait ne pas entendre. Les errements du jeune Télesphore constituaient le seul drame domestique que connût la maison. Pour s’expliquer à elle-même et pour lui faire comprendre à lui ses péchés perpétuels, la mère Chapdelaine s’était façonné une sorte de polythéisme compliqué, tout un monde surnaturel où des génies néfastes ou bienveillants le poussaient tour à tour à la faute et au repentir. L’enfant avait fini par ne se considérer lui-même que comme un simple champ clos, où des démons assurément malins et des anges bons mais un peu simples se livraient sans fin un combat inégal. Devant le pot de confitures vide il murmurait d’un air sombre : — C’est le démon de la gourmandise qui m’a tenté. Rentrant d’une escapade avec des vêtements déchirés et salis, il expliquait, sans attendre des reproches : — Le démon de la désobéissance m’a fait faire ça. C’est lui, certain ! Et presque aussitôt il affirmait son indignation et ses bonnes intentions. — Mais il ne faut pas qu’il y revienne, eh, sa mère ! Il ne faut pas qu’il y revienne, ce méchant démon. Je prendrai le fusil à son père et je le tuerai… — On ne tue pas les démons avec un fusil, prononçait la mère Chapdelaine. Quand tu sens la tentation qui vient, prends ton chapelet et dis des prières. Télesphore n’osait répondre ; mais il secouait la tête d’un air de doute. Le fusil lui paraissait à la fois plus plaisant et plus sûr et il rêvait d’un combat héroïque, d’une longue tuerie dont il sortirait parfait et pur, délivré à jamais des embûches du Malin. Samuel Chapdelaine rentra dans la maison et le souper fut servi. Les signes de croix autour de la table ; les lèvres remuant en des Benedicite muets, Télesphore et Alma-Rose récitant les leurs à haute voix ; puis d’autres signes de croix ; le bruit des chaises et du banc approchés, les cuillers heurtant les assiettes. Il sembla à Maria qu’elle remarquait ces gestes et ces sons pour la première fois de sa vie, après son absence ; qu’ils étaient différents des sons et des gestes d’ailleurs et revêtaient une douceur et une solennité particulières d’être accomplis en cette maison isolée dans les bois. Ils achevaient de souper lorsqu’un bruit de pas se fit entendre au-dehors ; Chien dressa les oreilles, mais sans grogner. — Un veineux, dit la mère Chapdelaine. C’est Eutrope Gagnon qui vient nous voir. La prophétie était facile puisque Eutrope Gagnon était leur unique voisin. L’aimée précédente, il avait pris une concession à deux milles de là avec son frère ; ce dernier était monté aux chantiers pour l’hiver, le laissant seul dans la hutte de troncs bruts quels avaient élevée. Il apparut sur le seuil, son fanal à la main. — Salut un chacun, fit-il en ôtant son casque de laine. La nuit était claire et il y a encore une croûte sur la neige ; alors puisque ça marchait bien, j’ai pensé que je viendrais veiller et voir si vous étiez revenu. Malgré qu’il vînt pour Maria, comme chacun savait, c’était au père Chapdelaine seulement qu’il s’adressait, un peu par timidité et un peu par respect de l’étiquette paysanne. Il prit la chaise qu’on lui avançait. — Le temps est doux ; c’est tout juste s’il ne mouille pas. On voit que les pluies de printemps arrivent… C’était commencer ainsi une de ces conversations de paysans qui sont comme une interminable mélopée pleine de redites, chacun approuvant les paroles qui viennent d’être prononcées et y ajoutant d’autres paroles qui les répètent. Et le sujet en fut tout naturellement l’éternelle lamentation canadienne ; la plainte sans révolte contre le fardeau écrasant du long hiver. — Les animaux sont dans l’étable depuis la fin de septembre, et il ne reste quasiment plus rien dans la grange, dit la mère Chapdelaine. Hormis que le printemps n’arrive bientôt, je ne sais pas ce que nous allons faire. — Encore trois semaines avant qu’on puisse les mettre dehors, pour le moins ! — Un cheval, trois vaches, un cochon et des moutons, sans compter les poules, c’est que ça mange, dit Tit’Bé d’un air de grande sagesse. Il fumait et causait avec les hommes maintenant, de par ses quatorze ans, ses larges épaules et sa...



Ihre Fragen, Wünsche oder Anmerkungen
Vorname*
Nachname*
Ihre E-Mail-Adresse*
Kundennr.
Ihre Nachricht*
Lediglich mit * gekennzeichnete Felder sind Pflichtfelder.
Wenn Sie die im Kontaktformular eingegebenen Daten durch Klick auf den nachfolgenden Button übersenden, erklären Sie sich damit einverstanden, dass wir Ihr Angaben für die Beantwortung Ihrer Anfrage verwenden. Selbstverständlich werden Ihre Daten vertraulich behandelt und nicht an Dritte weitergegeben. Sie können der Verwendung Ihrer Daten jederzeit widersprechen. Das Datenhandling bei Sack Fachmedien erklären wir Ihnen in unserer Datenschutzerklärung.