E-Book, Französisch, 78 Seiten
Molière Dom Juan
1. Auflage 2019
ISBN: 978-2-322-09247-5
Verlag: BoD - Books on Demand
Format: EPUB
Kopierschutz: 6 - ePub Watermark
E-Book, Französisch, 78 Seiten
ISBN: 978-2-322-09247-5
Verlag: BoD - Books on Demand
Format: EPUB
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Dom Juan vient de quitter sa femme pour tenter d'enlever à son futur époux une jeune fiancée trop éprise de son prétendant pour que l'idée ne lui vienne pas de troubler leur bonheur. Puis il jette son dévolu sur de jeunes paysannes qu'il promet d'épouser. Sganarelle a beau timidement tenter de ramener son maître libertin dans le chemin de la vertu et de la religion, Dom Juan préfère les plaisirs transitoires de ce monde, si dangereux pour son salut, à l'espérance d'une béatitude infinie. D'autres pourtant l'avertiront « qu'une méchante vie amène une méchante mort »... Venu de Tirso de Molina et de son Burlador de Sevilla, le sujet dont Molière s'empare en 1665 a déjà donné lieu à d'assez nombreuses pièces. Pourtant, rien de plus personnel que ces cinq actes en prose conduits avec une éclatante maîtrise qui donne aux personnages la profondeur de l'humanité vraie. De la farce jusqu'à l'ironie la plus fine, la pièce propose tous les registres du comique. Mais c'est aussi la plus tragique des comédies, qui prend la dimension d'un drame métaphysique.
Jean-Baptiste entre au collège de Clermont (actuel lycée Louis le Grand). Il a pour condisciple le prince de Conti, qui deviendra l'un de ses protecteurs 1640 Il suit des études de droit pour devenir avocat, titre qui permet alors l'achat d'une charge dans la justice ou l'administration. 1641 Jean-Baptiste est reçu avocat 1643 Il renonce à la possibilité de promotion sociale que lui offre ce diplôme. Il décide, contre l'avis de son père, de devenir comédien. Avec sa maîtresse Madeleine Béjart, une comédienne déjà connue, la famille de celle-ci et quelques autres comédiens, il fonde la compagnie théâtrale l'Illustre-Théâtre. Il prend le nom de Molière. Les raisons qui l'ont incité à choisir ce pseudonyme n'ont jamais été élucidées. 1645 Au printemps, la troupe l'Illustre-Théâtre fait faillite Emprisonné pour dettes en Août, Molière est libéré deux jours plus tard, grâce à l'intervention de son père . La même année, il quitte Paris, avec la troupe de Charles Dufresne. Ils vont parcourir l'ouest et le sud de la France pendant plus de treize ans
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Acte deuxième
Le théâtre représente une campagne, au bord de la mer. Scène I
Charlotte, Pierrot.
CHARLOTTE
Notre dinse ! Piarrot, tu t’es trouvé là bien à point. PIERROT
Parquienne ! il ne s’en est pas fallu l’épaisseur d’une éplinque, qu’il ne se sayant nayés tous deux. CHARLOTTE
C’est donc le coup de vent d’à matin qui les avait ranvarsés dans la mar ? PIERROT
Aga, guien, Charlotte, je m’en vas te conter tout fin drait comme cela est venu ; car, comme dit l’autre, je les ai le premier avisés, avisés le premier je les ai. Enfin donc j’étions sur le bord de la mar, moi et le gros Lucas, et je nous amusions à batifoler avec des mottes de tarre que je nous jesquions à la tête ; car, comme tu sais bian, le gros Lucas aime à batifoler, et moi, par fouas, je batifole itou. En batifolant donc, pisque batifoler y a, j’ai apparçu de tout loin queuque chose qui grouillait dans gliau, et qui venait comme envars nous par secousse. Je voyais cela fixiblement, et pis tout d’un coup je voyais que je ne voyais plus rien. « Eh ! Lucas, ç’ai-je fait, je pense que v’là des hommes qui nageant là-bas. – Voire, ce m’a-t-il fait, t’as été au trépassement d’un chat, t’as la vue trouble. – Palsanquenne ! ç’ai-je fait, je n’ai point la vue trouble, ce sont des hommes. – Point du tout, ce m’a-t-il fait, t’as la barlue. – Veux-tu gager, ç’ai-je fait, que je n’ai point la barlue, ç’ai-je fait, et que ce sont deux hommes, ç’ai-je fait, qui nageant droit ici, ç’ai-je fait ? – Morquenne ! ce m’a-t-il fait, je gage que non. – Oh ! çà, ç’ai-je fait, veux-tu gager dix sols que si ? – Je le veux bian, ce m’a-t-il fait ; et, pour te montrer, vlà argent su jeu, ce m’a-t-il fait. » Moi, je n’ai point été ni fou, ni étourdi ; j’ai bravement bouté à tarre quatre pièces tapées, et cinq sols en doubles, jerniguenne ! aussi hardiment que si j’avais avalé un varre de vin ; car je sis hasardeux, moi, et je vas à la débandade. Je savais bian ce que je faisais pourtant. Queuque gniais ! Enfin donc, je n’avons pas putôt eu gagé, que j’avons vu les deux hommes tout à plain, qui nous faisiant signe de les aller querir ; et moi de tirer auparavant les enjeux. « Allons, Lucas, ç’ai-je dit, tu vois bian qu’ils nous appelont ; allons vite à leu secours. – Non, ce m’a-t-il dit, ils m’ont fait pardre. » Oh ! donc, tanquia, qu’à la parfin, pour le faire court, je l’ai tant sarmonné, que je nous sommes boutés dans une barque, et pis j’avons tant fait cahin caha, que je les avons tirés de gliau, et pis je les avons menés cheux nous auprès du feu, et pis ils se sant dépouillés tout nus pour se sécher, et pis il y en est venu encore deux de la même bande qui s’équiant sauvés tout seuls, et pis Mathurine est arrivée là, à qui l’en a fait les doux yeux. V’là justement, Charlotte, comme tout ça s’est fait. CHARLOTTE
Ne m’as-tu pas dit, Piarrot, qu’il y en a un qu’est bien pu mieux fait que les autres ? PIERROT
Oui, c’est le maître. Il faut que ce soit queuque gros, gros monsieur, car il a du dor à son habit tout depis le haut jusqu’en bas ; et ceux qui le servont sont des monsieux eux-mêmes ; et stapandant, tout gros monsieur qu’il est, il serait, par ma fique, nayé, si je n’aviomme été là. CHARLOTTE
Ardez un peu ! PIERROT
Oh ! parquenne ! sans nous, il en avait pour sa maine de fèves ? CHARLOTTE
Est-il encore cheux toi tout nu, Piarrot ? PIERROT
Nannain ; ils l’avont r’habillé tout devant nous. Mon Quieu ! je n’en avais jamais vu s’habiller. Que d’histoires et d’engigorniaux boutont ces messieus-là les courtisans ! Je me pardrais là-dedans, pour moi, et j’étais tout ébobi de voir ça. Quien, Charlotte, ils avont des cheveux qui ne tenont point à leu tête ; et ils boutont ça, après tout, comme un gros bonnet de filasse. Ils ant des chemises qui ant des manches où j’entrerions tout brandis, toi et moi. En glieu d’haut-de-chausse, ils portont un garde-robe aussi large que d’ici à Pâques ; en glieu de pourpoint, de petites brassières qui ne leu venont pas jusqu’au brichet ; et, en glieu de rabats, un grand mouchoir de cou à réziau, aveuc quatre grosses houpes de linge qui leu pendont sur l’estomaque. Ils avont itou d’autres petits rabats au bout des bras, et de grands entonnois de passement aux jambes ; et, parmi tout ça, tant de rubans, tant de rubans, que c’est une vraie piquié. Ignia pas jusqu’aux souliers qui n’en soyont farcis tout depis un bout jusqu’à l’autre ; et ils sont faits d’eune façon que je me romprais le cou aveuc. CHARLOTTE
Par ma fi ! Piarrot, il faut que j’aille voir un peu ça. PIERROT
Oh ! acoute un peu auparavant, Charlotte. J’ai queuque autre chose à te dire, moi. CHARLOTTE
Eh bian ! dis, qu’est-ce que c’est ? PIERROT
Vois-tu, Charlotte, il faut, comme dit l’autre, que je débonde mon cœur. Je t’aime, tu le sais bian, et je sommes pour être mariés ensemble ; mais, marquenne ! je ne suis point satisfait de toi. CHARLOTTE
Quement ? qu’est-ce que c’est donc qu’iglia ? PIERROT
Iglia que tu me chagraignes l’esprit, franchement. CHARLOTTE
Et quement donc ? PIERROT
Testiguenne ! tu ne m’aimes point. CHARLOTTE
Ah ! ah ! n’est-ce que ça ? PIERROT
Oui, ce n’est que ça, et c’est bian assez. CHARLOTTE
Mon Quieu ! Piarrot, tu me viens toujou dire la même chose. PIERROT
Je te dis toujou la même chose, parce que c’est toujou la même chose ; et, si ce n’était pas toujou la même chose, je ne te dirais pas toujou la même chose. CHARLOTTE
Mais qu’est-ce qu’il te faut ? Que veux-tu ? PIERROT
Jerniquenne ! je veux que tu m’aimes. CHARLOTTE
Est-ce que je ne t’aime pas ? PIERROT
Non, tu ne m’aimes pas, et si, je fais tout ce que je pis pour ça. Je t’achète, sans reproche, des rubans à tous les marciers qui passont ; je me romps le cou à t’aller dénicher des marles ; je fais jouer pour toi les vielleux quand ce vient ta fête ; et tout ça comme si je me frappais la tête contre un mur. Vois-tu, ça n’est ni biau ni honnête de n’aimer pas les gens qui nous aimont. CHARLOTTE
Mais, mon Quieu ! je t’aime aussi. PIERROT
Oui, tu m’aimes d’une belle dégaine ! CHARLOTTE
Quement veux-tu donc qu’on fasse ? PIERROT
Je veux que l’en fasse comme l’en fait, quand l’en aime comme il faut. CHARLOTTE
Ne t’aimé-je pas aussi comme il faut ? PIERROT
Non. Quand ça est, ça se voit, et l’en fait mille petites singeries aux personnes quand on les aime du bon du cœur. Regarde la grosse Thomasse, comme alle est assottée du jeune Robain ; alle est toujou autour de li à l’agacer, et ne le laisse jamais en repos. Toujou al li fait queuque niche, ou li baille queuque taloche en passant ; et l’autre jour qu’il était assis sur un escabiau, al fut le tirer de dessous li, et le fit choir tout de son long par tarre. Jarni ! vlà où l’en voit les gens qui aimont ; mais toi, tu ne me dis jamais mot, t’es toujou là comme eune vraie souche de bois ; et je passerais vingt fois devant toi, que tu ne te grouillerais pas pour me bailler le moindre coup, ou me dire la moindre chose. Ventrequenne ! ça n’est pas bian, après tout ; et t’es trop froide pour les gens. CHARLOTTE
Que veux-tu que j’y fasse ? C’est mon himeur, et je ne me pis refondre. PIERROT
Ignia himeur qui quienne. Quand en a de l’amiquié pour les personnes, l’en en baille toujou queuque petite signifiance. CHARLOTTE
Enfin, je t’aime tout autant que je pis ; et si tu n’es pas content de ça, tu n’as qu’à en aimer queuque autre. PIERROT
Eh bian ! vlà pas mon compte ? Testigué ! si tu m’aimais, me dirais-tu ça ? CHARLOTTE
Pourquoi me viens-tu aussi tarabuster l’esprit ? PIERROT
Morqué ! queu mal te fais-je ? Je ne te demande qu’un peu d’amiquié. CHARLOTTE
Eh bien ! laisse faire aussi, et ne me presse point tant. Peut-être que ça viendra tout d’un coup sans y songer. PIERROT
Touche donc là, Charlotte. CHARLOTTE, donnant sa main.
Eh bien ! quien. PIERROT
Promets-moi donc que tu tâcheras de m’aimer davantage. CHARLOTTE
J’y ferai tout ce que je pourrai ; mais il faut que ça vienne de lui-même. Pierrot, est-ce là ce monsieur ? PIERROT
Oui, le vlà. CHARLOTTE
Ah ! mon Quieu ! qu’il est genti, et que c’aurait...